23 janvier 2009
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La Ville de Paris recense environ 700 statues à l'air libre. Elles sont un livre d'histoire à ciel ouvert et font partie du paysage parisien. Que serait la rue des écoles sans Montaigne, le carrefour de l'Odéon sans Danton, le Pont-Neuf sans Henri IV! En plus d'embellir l'espace urbain, le rôle des statues a d'abord été moral.
Statue de Danton à Paris
Les statues rappellent au passant que des « hommes illustres » ont accompli de grandes choses au service du bien public, elles exaltent les vertus républicaines et honorent des citoyens remarquables. Le député Bienaimé proclamait à la Convention de 1794 1: "« (leur) exemple élèvera l'âme du peuple ».
Statue de Denis Diderot à Paris
Les guerres sont propices à l'exaltation et au culte des héros. Beaucoup de militaires, oubliés aujourd'hui, ont eu l'honneur d'être coulés dans le bronze ou taillés dans le marbre. La statuaire publique a toujours célébré en plus des soldats, des philosophes, des poètes, des savants. Les statues de femmes illustres sont peu nombreuses. Il y a bien trois statues de Jeanne d'Arc à Paris mais la plupart des femmes représentées sont des déesses, des nymphes ou des allégories: la République, la Nation, l'Europe etc...
Allégorie de la République à Clermont-L'Hérault
Les grands groupes sculptés structurent la ville. Ils sont des points de repère, de ralliement. A Paris, les défilés républicains ou syndicaux vont de la place de la Nation où trône «Le Triomphe de la République» de Jules Dalou à la place de la République ornée d'une statue de Marianne en bronze entourée de la Liberté, de l'Egalité et de la Fraternité sculptéés dans la pierre. Ces oeuvres monumentales sont des symboles forts de la démocratie. Le Front National, quant à lui, se réunit autour de la statue dorée de Jeanne d'Arc, place des Pyramides.
Allégorie de la République à Agde
La grandiloquence des statues fait parfois sourire et renvoie à une époque dépassée. Depuis la remise en question de l'art figuratif par les cubistes au début du vingtième siècle, l'art réaliste, et souvent pompier, qui glorifie les hommes valeureux et les beaux sentiments est suspect. On peut admirer la maîtrise technique des artistes et se méfier de leur enthousiasme pour les vertus civiques. Trop politiquement correct!
Hommage à Delacroix, groupe sculté de Jules Dalou
dans le jardin du Luxembourg
Les monuments aux morts, les statues de guerriers tombés au combat, morts pour la France, sont érigés par les survivants. Louis-Ferdinand Céline écrivait dans "Voyage au bout de la nuit": « La poésie héroïque possède sans résistance ceux qui ne vont pas à la guerre et mieux encore ceux que la guerre est en train d'enrichir énormément. »
Statue de Thomas Jefferson à Paris
A l'heure du désenchantement, rendre hommage aux grands hommes est un peu désuet, comme la légion d'honneur ou l'élection à l'Académie Française. Les nouvelles statues réalistes à Paris sont rares; Winston Churchill (1998) et Charles de Gaulle (2000) près du Grand Palais, Thomas Jefferson face au musée d'Orsay, toutes trois réalisées par Jean Cardot. Il vaut mieux ignorer l'affreux buste de Dalida d'Alain Aslan, à Montmartre.
Statue de Winston Churchill devant le Petit Palais à Paris.
Xavier Veilhan à Versailles renouvelle la statuaire publique avec neuf sculptures d'architectes contemporains célèbres réalisées à partir de scanners 3D. Voir l'article et les photos.
Liens sur ce blog:
Journée de la femme: poncifs des statues traditionnelles: la vertu, le foyer, l'enfant etc ...
Le triomphe de Silène, groupe sculpté de Jules Dalou
Le nouvel hommage au Général Alexandre Dumas
Le socle vide de la statue de Charles Fourier l'utopiste
René Letourneur, sculpteur néo-classique
Gloria Friedmann au musée Bourdelle: dérision et patriotisme
Palagret
Texte et photos
Texte et photos
janvier 2009
1- in L'esthétique de la rue Colloque d'Amiens L'Harmattan 1998