Comme des nuages noirs tombés du ciel, des décors en contreplaqué occupent l'espace 315 du Centre Pompidou. "L'air du temps" de Latifa Echakhch est constitué de dizaines de sculptures. A côté de chaque nuage noir, un objet dérisoire ou obsolète à moitié badigeonné d'encre, témoin du passé: valise pleine de vieilles photos, transistor, vase de fleurs artificielles, flacon de parfum Nina Ricci, fil à broder rouge ou roses des sables venus du Maroc, pays de l'enfance de la plasticienne, etc ...
L'air du temps, encrage (la lampe coquillage), installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou, espace 315
Lauréate du prix Marcel Ducham^2013
Ces formes noires sont comme Janus, doubles, noires d'un côté, bleu ciel et blanc de l'autre. En entrant le visiteur voit l'envers du décor, une installation assez sinistre avec des objets qui semblent brûlés, sauvés d'un désastre. En se retournant il voit de joyeuses nuées posées sur le sol (la terre) et suspendues par des fils accrochés au plafond (le ciel).
L'air du temps,côté clair, installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
Latifa Echakhch: "J'ai appréhendé l'Espace 315 en m'intéressant principalement à sa forme. C'est un rectangle allongé, une sorte de boîte qui m'évoquait un peu l'idée d'une « camera obscura » où l'image est inversée. Dans l'exposition, les nuages flottent ainsi légèrement au-dessus du sol, et le parquet très brillant redouble encore cette impression de basculement. J'ai en quelque sorte cherché à étirer/condenser un paysage dans le lieu, afin de jouer avec différents plans ou strates de lecture, et différentes échelles." 1
L'air du temps, installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
"Ces nuages n'ont pas une signification arrêtée, précise. Ils permettent une forme de condensation. Il s'agit d'offrir une seule et même vue d'un ensemble, comme un paysage de bord de lac où l’on peut voir le ciel, l'eau et les berges se refléter les uns sur les autres, les uns dans les autres. Il y a ici un jeu avec le haut et le bas, le recto et le verso. Un jeu de basculement qui permet une forme de synthèse, et concourt à créer une sensation onirique tout en attirant l'attention du visiteur sur les sculptures."
L'air du temps, encrage (vase et fleurs), installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
Chaque nuage est un encrage (ou ancrage?). Il se distingue des autres par l'objet qui lui est accolé: Encrage (la lampe coquillage, encrage ( le puzzle de paysage de montagne) etc ...
L'air du temps, encrage (lecteur de cassette), installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
L'air du temps, encrage (boules de pétanque), installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
" Le noir renvoie à la fois à l'idée d'un temps d'action passé et arrêté, ainsi qu’à un ensemble en puissance de gestes à venir."
L'air du temps, côté clair, installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
Avec des matériaux modestes et des objets à peine modifiés, presque des ready-made, Latifa Echakhch crée une installation onirique, un trompe-l'oeil de théâtre naïf où différents plans de décor simulent la profondeur, un trompe-l'oeil abandonné au sol comme après une représentation. En février 2014, chez Kamel Mennour, la plasticienne faisait aussi tomber le ciel (the sky is falling) avec une toile peinte affalée, à moitié suspendue.
L'air du temps, titre de l'installation de Latifa Echakhch, est aussi le nom du parfum Nina Ricci crée en 1948. Petite fille, Latifa Echakhchen en possédait un échantillon.
The sky is falling, Latifa Echakhch, galerie Kamel Mennour
Latifa Echakhch est née en 1974 à El Khnansa, Maroc. Elle vit et travaille à Martigny, Suisse.
Dossier de presse:
Depuis plus de dix ans, le Centre Pompidou accueille chaque année les lauréats des Prix Marcel Duchamp pour une exposition personnelle et inédite dans l'Espace 315, durant trois mois.
Après Daniel Dewar et Grégory Gicquel, lauréats 2012, Latifa Echakhch a reçu le Prix Marcel Duchamp 2013, décerné chaque année à un artiste novateur de la scène française, et répondra à l'invitation du Centre Pompidou, en partenariat avec l'Adiaf.
« Le jury a été sensible à la manière dont Latifa Echakhch sait activer le potentiel de l'espace qu'elle investit en faisant appel à des éléments aisément reconnaissables, a précisé Alfred Pacquement, alors président du jury.
Son oeuvre entre surréalisme et conceptualisme questionne avec économie et précision l'importance des symboles et traduit la fragilité du modernisme.
L'air du temps, encrage, installation de Latifa Echakhch, centre Pompidou
Latifa Echakhch, L'air du temps
du 8/10/2014 au 26/01/2015
Espace 315, Centre Pompidou
Palagret
art contemporain. Prix Marcel Duchamp
décembre 2014