15 octobre 2009 4 15 /10 /octobre /2009 11:20


  
    "Il n'y aura pas de miracle ici",
le message lapidaire emprunte sa forme aux titres de film qu'on voyait jadis au fronton des cinémas américains. Mais Nathan Coley n'annonce ni "Miracle sur la 34ème rue" (G. Seaton 1947) ni aucun film hollywoodien au dénouement heureux. Il ne vend pas de rêve, il nous renvoie, avec humour, à un monde désenchanté qui a perdu le sens du merveilleux.

     "C'est une grande sculpture qui parle de l'invisibilité des choses et je crois que c'est beau" dit Nathan Coley.


    

There will be no miracles here, Nathan Coley, 2006
Nuit Blanche 09, Buttes-Chaumont
 
   Formées d'ampoules à incandescence, les lettres lumineuses brillent dans l'obscurité, cachant presque l'échafaudage métallique haut de six mètres sur lequel elles sont assemblées. Nathan Coley a choisi des ampoules à haute consommation, peu écologiques. Vouées à disparaître, elles donnent une touche désuète à l'installation posée sur une pelouse du parc des Buttes-Chaumont.

 

   
We must cultivate our garden, Nathan Coley, 2006
Nuit Blanche 09, Buttes-Chaumont
 
  Un peu plus loin dans le parc, une injonction lumineuse troue la nuit: "we must cultivate our garden". C'est la traduction de la déclaration de Candide  "Il faut cultiver notre jardin", phrase qui clôt le conte philosophique de Voltaire. Nathan Coley nous conseille de nous occuper de choses concrètes et de ne pas trop philosopher. Il faut aussi cultiver son jardin secret. Une phrase pleine de bon sens qui, affichée en grand dans la nuit et dans un jardin, devient ironique.



We must cultivate our garden, Nathan Coley, 2007
Nuit Blanche 09, Buttes-Chaumont
   Troisième installation lumineuse: "Gathering of strangers", Rassemblement d'étrangers. Les promeneurs de la Nuit Blanche sont effectivement étrangers les uns aux autres et ils se rassemblent au pied des échafaudages pour lire et commenter les déclarations de Coley.

   Ses trois phrases énoncent des vérités incontestables et banales. Affichées en lettres monumentales, comme des slogans dans un pays totalitaire, elles deviennent dérisoires, révélant le comique des discours péremptoires et des slogans.

   Au contraire des multiples affichages publicitaires ou, aux Etats-Unis, religieux qui bordent les routes, les installations de Nathan Coley sont isolées au milieu d'un parc.

    A ciel ouvert ou sous les arbres, les phrases brillantes participent à la magie de la Nuit Blanche aux Buttes-Chaumont, à côté des lampes plantées sur la pelouse de
Rune Guneriussen, des guirlandes de Vincent Olinet,  des parapluies rouges et des disques d'or de Noël Dolla.


Gathering of strangers, Nathan Coley, 2007
Nuit Blanche 09, Buttes-Chaumont



    Il existe une quatrième enseigne lumineuse qui n'est pas exposée ici: "Heaven is a place where nothing ever happens", "le Ciel est une endroit où rien n'arrive jamais". Comme "There will be no miracles here", la phrase est désabusée mais pour parler du ciel et de miracle, il faut y avoir cru.

    Nathan Coley est né en 1965 en Ecosse. Il a été sélectionné pour le Turner prize 2007 et est connu pour ses maquettes de maison, une réflexion sur l'architecture dans l'espace public. Il joue avec les dimensions et la perception en posant une maison paysanne sur le toit d'un immeuble ou en peignant ses maquettes de bandes blanches et bleues. Les titres de ses oeuvres contrastent avec ceux des plasticiens contemporains qui intitulent leurs travail: untitled III, n°4 ou installation 5. Coley aime jouer avec les mots et ses titres sont intrigants. "Annihilaton confessions", en 2007, ou "Secular icon in an age of moral incertainty", en 2006, pourraient être sur la couverture d'un livre de réflexions philosophiques sur l'art contemporain.

    Ici, sous la pleine lune, le titre en lettres lumineuses est lui même l'oeuvre.



Nathan Coley
Installations lumineuses
Parc des Buttes-Chaumont, Paris
Nuit Blanche 2009 du 3 octobre




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