Nouer des sacs de plastique coloré sur un filet au milieu de l'atrium de la Gare Saint-Lazare, voilà une occupation ludique qui attire les badauds. Du 15 au 21 mai 2012, des centaines de voyageurs de la gare Saint-Lazare ont vu s'ériger au milieu de l'atrium une drôle de sculpture faite de banals sacs plastiques.
Plastic Bags, Pascale Marthine Tayou, Gare Saint-Lazare, Paris
Le plasticien camerounais Pascale Marthine Tayou invitait les passants à contribuer à Plastic bags, oeuvre participative. Trois comédiens allaient chercher des volontaires dans la foule et une équipe constituée d'étudiants et du personnel de la Galleria Continua encadrait le travail. Une fois finie, la colonne compte 25 000 sacs biodégradables attachés à un filet et traverse les trois niveaux de l'atrium sur 10 mètres de haut.
Plastic Bags, Pascale Marthine Tayou, Gare Saint-Lazare, Paris
La sculpture se réfère aux Nymphéas de Claude Monet avec ses couleurs estompées. Ici dans l'atrium rénové de la gare, les couleurs franches - bleu, rouge, blanc, jaune, vert - des sacs se mélangent vu de loin mais la référence au peintre impressionniste n'est pas évidente. Le nom de Monet évoque cependant la gare Saint-Lazare puisque une série de douze tableaux dépeint la verrière enfumée par les locomotives à vapeur avec différents effets de lumière.
Plastic Bags, Pascale Marthine Tayou, Gare Saint-Lazare, Paris
"J’espère que Monet ne se retourne pas dans sa tombe! Il s’agit pour nous de faire modestement une nouvelle proposition contemporaine", dit prudement Pascale Marthine Tayou. 1
Plastic Bags, Pascale Marthine Tayou, Gare Saint-Lazare, Paris
Le sac plastique incarne la surconsommation de nos sociétés, la prolifération des déchets, le gâchis des ressources de la planète et le problème du recyclage. Des sacs plastiques pourrissent l'environnement aussi bien en Occident qu'en Afrique ou en Asie. Conscient ou non de la signification symbolique de ces sacs ou de la dimension artistique de la colonne, les participants de mai accrochaient joyeusement les sacs.
Plastic Bags, Pascale Marthine Tayou, Gare Saint-Lazare, Paris
"Je suis avant tout un artiste visuel, je souhaite apporter une joie de vivre et une harmonie. Montrer que le plastique, le “mal”, peut porter le costume du “bien”. 1
Depuis l'installation de la colonne en mai, la structure s'est légèrement affaissée, les sacs se sont tassés. Plastic Bags restera en place un an puis l'oeuvre sera peut-être réinstallée ailleurs. Les sacs plastiques sont biodégradables donc l'oeuvre finira par se détruire sous l'action de la lumière.
Plastic Bags, Pascale Marthine Tayou, Gare Saint-Lazare, Paris
La gare Saint-Lazare voit passer 450 000 voyageurs par jour et un train toutes les 28 secondes. Dans cette ruche bruissante, l'oeuvre de Pascale Marthine Tayou haute de 10 mètres donne une note insolite à la halle blanche, ancienne Salle des pas perdus rénovée en centre commercial. Des centaines de banlieusards trop pressés empruntent les escalators qui relient les trois niveaux. Bien peu remarquent l'accumulation monumentale de sacs semblables à ceux qu'ils transportent. La sculpture est pourtant juste sous leurs yeux. C'est le destin des oeuvres dans l'espace publique. Il reste quand même quelques voyageurs qui se sont donné rendez-vous là et qui font les cent pas pour tuer le temps. Certains contemplent Plastic Bags avec perplexité ou amusement.
Video:Pascale Marthine Tayou rencontre Claude Monet... par ikonotv
Pascale Marthine Tayou utilise ici l'accumulation et la profusion d'objets du quotidien comme dans ses sculptures exposées à La Villette ou sa colonne de casseroles exposée aux Tuileries pendant la Fiac 12.
Home sweet home, Pascale Marthine Tayou, La Villette, octobre 2012
Palagret
art contemporain dans l'espace public
janvier 2012
Colonne Pascale (détail), Pascale Marthine Tayou, Jardin des Tuileries
Lien:
Entretien avec Pascale Marthine Tayou
1- in 20minutes