18 novembre 2011 5 18 /11 /novembre /2011 18:29

 

   Le sujet central de l'oeuvre de Tracey Emin est Tracey Emin elle même. Comme dans un journal intime livré à tous, Tracey Emin relate son viol à Margate, ses avortements, son alcoolisme, son impossibilité à trouver l'amour ou à avoir un enfant. 

 


 

 

Tracy Emin quilt Hayward ashYou bitch, Everythig you steel will turn to ash

Blanket, quilt, de Tracey Emin

 

 

     Narcissique, Tracey Emin se contemple et s'expose elle-même dans des chroniques journalistiques 1, des quilts, des films, des dessins érotiques, des néons, des sculptures qui racontent ses frustrations et ses espoirs déçus. Une vie misérable auquel le succès artistique ne semble pas apporter de réconfort.

 

 


 

     Tracy Emin quilt Hayward no chanceSometimes nothing makes sense and everything seems so far away, no chance

Quilt de Tracey Emin

 

 

 

 

   L'exposition "Love is what you want" à la Hayward Gallery de Londres présente une rétrospective sur vingt ans de l'oeuvre de Tracey Emin.  A côté d'un pont de bois branlant (knowing my enemy 2002), la première salle accueille une dizaine de blankets, couvertures grossièrement brodées accrochées aux murs. De loin, les quilts colorés ont l'air joyeux, de près ils révèlent le monde douloureux de Tracey Emin montré comme une continuelle performance de violence et de trahison.


 


 

Tracy Emin quilt Hayward realThe end of something real, blanket de Tracey Emin



 

 Les couvertures-bannières de Tracey Emin portent des phrases crues:  Psycho slut, they were the ugly cunts, Harder and Better Than All of You Fucking Bastards, Heller fucking skelter, Fuck school why go somewhere every day to be told you’re late.

   Des phrases désabusées: I Didn’t Know I had to Share Your Life, You Cruel Heartless Bitch, Rot in Hell.

   Des phrases banalement sentimentales: I find your attitude a little bit negative, I want an international lover that loves me more than the world, we are going to get married in Las Vegas. 



 

 

Tracy Emin quilt Hayward Tour EiffelPsycho slut, Permission to fire. Bannières de Tracey Emin

 

 

 

    Chaque bannière est un assemblage de tissus de textures contrastées, mates ou brillantes, et de motifs différents (fleurs, points, rayures) comme les quilts traditionnels faits de chutes et de vêtements usagés cousus ensemble, une pratique économique pour fabriquer des couvertures à partir des restes. Ces quilts, réceptacles de la mémoire domestique, racontaient aussi l'histoire des familles.      

   Les couvertures appliquées sont aussi une réminiscence des bannières portées dans les processions religieuses ou politiques avec leurs slogans et leurs images.



 

 

Tracy Emin blanket suspect

suspect, détail, bannière de Tracey Emin

 


 

 

 Tracey Emin applique des lettres, des dates, des documents, des messages obscurs et de petits dessins cousus sur le support. Le mélange des formes, couleurs et mots forment un patchwork, un collage très lisible relatant un évènement précis où Tracy Emin crie sa colère, son dégoût, sa déception. Emin se protège en objectivant son histoire, comme en contenant son malheur dans les pages d'un journal intime. Un journal halluciné pas si loin de l'art brut, sauf que Tracey Emin est loin d'être naïve.


 

 

 

Tracy Emin quilt Hayward Heller

Total paranoïa, I find your attitude a little bit negative

I am disgusted by your envey, bannière de Tracey Emin

 

 

 

   On repère sur les couvertures des fautes d'orthographe, intentionnelles ou pas. Les erreurs révèleraient la spontanéité de l'artiste mais fabriquer de telles couvertures prend du temps, assez pour corriger les erreurs si on le veut. Les confusions de lettres sont peut-être une transgression de plus ou une coquetterie, une attitude rarement attribuée à la plasticienne anglaise.

    Sur les couvertures, seuls les textes sont provocants. Les dessins, tableaux et vidéos exposés dans d'autres salles sont plus crus.

 


 

      Tracy Emin quilt Hayward (1)

Couvertures brodées  et cabane (knowing my enemy 2002) de Tracey Emin à la Hayward Gallery


 

 

    Comme Frida Kahlo, Louise Bourgeois ou Yahoi Kusama, Tracey Emin ressasse les traumatismes de sa vie, la perte de son innocence, et en fait sa légende. A partir de techniques plutôt féminines, le quilt, les aiguilles, la broderie, Tracey Emin réalise une oeuvre dérangeante et brutale, transgressant les clichés de "l'art féminin".


 

 

 

Tracy Emin quilt Hayward HLettre H cousue

Quilt de Tracey Emin

 

 

 

 

    Les critiques sont divisés sur la valeur de son art, certains trouvent complaisante, vulgaire et sans intérêt cette accumulation d'anecdotes dignes d'un soap-opera. D'autres voient en Tracey Emin une des artistes les plus importantes de sa génération.



 

      Tracy Emin quilt Hayward die aloneI do not expect to be a mother but I do expect to die alone

I want an international lover that loves me more than the world

Quilt de Tracey Emin



 

   Entre voyeurisme, fascination et répulsion, le public observe l'oeuvre auto-biographique de Tracey Emin, une oeuvre totalement tirée du réel mais aussi fictionnelle, mise en forme.



 

Tracy Emin quilt Hayward AmericaWe are going to get maried in Las Vegas, we will drive across America

and have our honeymoon in the carribean

petits messages optimistes cousus sur une blanket de Tracey Emin

 



 

     Tracey Emin est née en 1963 à Croydon en Angleterre. Elle fait partie des British Young Artists repérés par Charles Saatchi. Elle s'est fait connaître du grand public par différents scandales: My bed (1998), la tente de Everyone I have ever slept with (1963-1995) etc ...

 


 

 Tracy-Emin-quilt-expo-coeur.jpgIt doesn't have to be like that, love to the end

Blanket de Tracey Emin, Love is what you want

 

 

 

 

   Ironiquement, "Love is what you want", l'amour est ce que vous voulez, est un titre fleur bleue, bien consensuel, pour une exposition aux images sexuelles provocantes. 

 

 


 

Love is what you want. Tracey Emin

Blankets, neons, films, memorabilia, drawings, paintings, sculptures, writings 

Hayward Gallery, Londres

Du 18 mai au 29 août 2011



 

 

Tracy-Emin-column.jpgMy life in column, chronique de Tracey Emin dans The independant

 

 

 

 

 

 

Liens sur ce blog:

Saint-Valentin: Tracey Emin illumine Times Square de néons romantiques

Yayoi Kusama et l'obsession des petits pois (dots) à La Villette

L'araignée géante de Louise Bourgeois aux Tuileries

Journée des femmes: Agnès Thurnauer réécrit l'histoire de l'art au féminin

 

 

 

 

 

Palagret

art contemporain

novembre 2011


 

 

Sources:

The telegraph

The Guardian 

Dossier de presse

1- Rubrique " My life in a column " dans le quotidien The Independent. 

Tracey Emin à la galerie Saatchi

Love is what you want

 

 

 

Mots clés: Tracey Emin, blanket, quilt, bannière, couverture, Hayward Gallery

   

 

 

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