17 janvier 2009 6 17 /01 /janvier /2009 20:34

 

    Du verre brisé, des traces de fumée sur le mur, des cloches muettes: tout parle de bruit et de fureur, de destruction après le passage des barbares. Mais de quels barbares s'agit-il? Le Collège des Bernardins, du XIII ème siècle à aujourd'hui, a connu bien des bouleversements. Les trois installations de Claudio Parmiggiani ne se réfèrent pas une histoire précise mais à l'esprit du lieu. Il montre la désolation après la violence, quand il n'en reste que l'écho.



Parmiggiani au Collège des Bernardins
trace de livres et verre brisé


    Les deux premières installations se trouvent dans la grande nef aux trente-deux colonnes. La première, la bibliothèque, n'est qu'une ombre de bibliothèque. On ne voit que la trace noire laissée par les livres brûlés sur le mur blanc. Cette « sculpture d'ombre » évoque l'ancienne bibliothèque du collège où les moines cisterciens venaient étudier. Elle évoque aussi toutes les bibliothèques détruites, Alexandrie la plus symbolique, et tous les autodafés de sinistre mémoire.




Parmiggiani au Collège des Bernardins
trace de livres
 
   Sur 25 mètres de rayonnage, Claudio Parmiggiani a soumis  20000 ouvrages à la fumigation, laissant une trace de cendre et de suie. On voit  l'empreinte des livres, leur négatif, leur souvenir, une métaphore du savoir perdu et toujours renaissant.


Parmiggiani-vitres-livres-Bernardins-4.jpgEmpreintes des livres et labyrinthe brisé,
Claudio Parmiggiani, Collège des Bernardins
    En 1995, Parmiggiani déclarait à propos des delocazione (déplacement):
«Les matériaux pour réaliser ces espaces, poussière, suie, et fumée, contribuaient à créer le climat d’un lieu abandonné par les hommes, exactement comme après un incendie, un climat de ville morte. Il ne restait que les ombres des choses, presque les ectoplasmes de formes disparues, évanouies, comme les ombres des corps humains vaporisés sur les murs d’Hiroshima.» 2






Parmiggiani au Collège des Bernardins



    Le collège des Bernardins, ancien monastère, est l’un des plus grands édifices médiévaux de Paris. Il vient d'être restauré par les Monuments Historiques et l’architecte Jean-Michel Wilmotte.





Claudio Parmiggiani
Du 22 novembre 2008 au 31 janvier 2009
Une création pour le Collège des Bernardins
du lundi au samedi de 10h à 18h
dimanche de 14h à 18h
Collège des Bernardins, entrée libre
20 rue de Poissy- 75005 Paris


Liens sur ce blog:



 

 

 

 

 

Palagret

art contemporain

janvier 2009

 


 

1- in Journal des Arts, janvier 2009

2- analyse des delocazione

www.collegedesbernardins.fr

 


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16 janvier 2009 5 16 /01 /janvier /2009 12:39
   
   Ben Vautier est un grand râleur et un grand humoriste. Si le suicide le hante depuis très longtemps, il ne se suicide pas, il écrit et il peint. Tant qu'il travaille, il est vivant et il expose à la galerie Daniel Templon « Ils se sont tous suicidés ».

Ben, "Ils se sont tous suicidés"
Galerie Templon



 « Rothko s'est suicidé, pas moi. De Staël s'est suicidé, pas moi. ... Cette nuit j'ai senti la mort comme un fleuve qui coule grand et large que rien ne peut arrêter. J'ai eu beau essayer de penser à autre chose, le fusil, la corde, tout se rapprochait. je suis sorti du lit, je suis allé chercher le fusil, je l'ai chargé, j'ai pris la corde, je suis monté sur l'échelle, ensuite je suis redescendu pour tout écrire et puis brûler ce que je venais d'écrire. » déclare Ben Vautier dans "Suicide d'artiste". 1


Je jette l'éponge, acrylique sur bois et éponge
Ben, "Ils se sont tous suicidés"

   En 1961, Ben avait même annoncé son suicide dans une mise en scène trop absurde pour être prise au sérieux: « en janvier, je fais part à la presse de mon intention de me faire écraser en forme d’aile de voiture par une presse de l’usine Renault, ou de me faire aplatir par un rouleau compresseur sur une toile qui serait vernie par ma femme après ma mort. » La performance n'a pas eu lieu.


La mort est simple, acrylique
Ben, "Ils se sont tous suicidés"


 
   La nouvelle exposition de Ben chez Daniel Templon, « Ils se sont tous suicidés », présente des portraits d'artistes suicidés et des phrases-tableaux. Les portraits des morts sont réalisés à partir de photos trouvées sur Google.

Le suicide de Kirchner. Ben, "Ils se sont tous suicidés"
    Les portraits encadrés de deux tableaux, "La mort est simple" et "la mort est partout", s'alignent sur le mur, accompagnés d'un texte de Ben qui relate le dernier acte des suicidés. On peut noter que l'écriture est moins ronde que dans ses tableaux. Il écrit plus vite:

Mark Rothko s'entaille les veines
Nicolas de Staël se jette par la fenêtre

 


Le suicide de Nicolas de Staël. Ben, "Ils se sont tous suicidés"

 

 

Vladimir Maïakovsky se tire une balle en plein coeur
Guy Debord aussi
Ernst Ludwig Kirchner se tue devant sa maison
Vincent Van Gogh se tire une balle dans la poitrine
Diane Arbus avale des barbituriques
Pierre Molinier se tire une balle dans la bouche
Ray Johnson se noie
Bernard Buffet s'étouffe avec un sac en plastique

 

 


Le suicide de Bernard Buffet. Ben, "Ils se sont tous suicidés"

 

 

 

 

Jackson Pollock se tue en voiture
Sigmund Freud se fait euthanasier par un ami
Virginia Woolf s'enfonce dans une mare les poches pleines de pierres

 

 


Photos de suicidés et "la mort est partout", acrylique sur toile
Ben, "Ils se sont tous suicidés"


    Le suicide est-il l'ultime geste artistique? Bien que de nombreux peintres, poètes ou musiciens se suicident, ils ne sont pas les seuls. Les paysans se pendent dans l'étable, les gendarmes se tirent une balle dans la tête  et les anonymes se jettent sous le métro. Le suicide est aussi une chose très commune chez les gens de peu.


"Ils se sont tous suicidés", acrylique sur toile
   Les destins tragiques que Ben a choisi sont terribles; les phrases qu'il calligraphie sont désespérées. Mais, en dépit d'une thématique funèbre, les tableaux de Ben restent assez toniques. Ben est connu pour ses phrases faussement naïves à l'écriture ronde. N'importe quel écolier possédant un cahier ou une trousse ornées de ses « pensées »  la reconnaît 2. Les cursives blanches sur fond noir sont apaisantes, elles font sourire avant d'inquiéter.

détail du mur peint à la galerie Daniel Templon. Ben
  Les couleurs vives contredisent elles aussi le message de mort. L'humour de certains tableaux-objets,  à moi la liberté (avec une corde), je jette l'éponge (avec une éponge), c'est à vous de choisir (avec une balance), pour Socrate (avec un pot de cigüe)  sont même drôles. Tant que Ben peint ses acryliques, il n'attente pas à sa vie.


« Je parle de suicide mais je ne me suicide pas, je parle de révolution, mais je m'installe devant la télé pour regarder MONK, BARNABY, et COLUMBO. Ok mais c’est pas grave la télé marche toujours. »

    Pour ne pas risquer de poursuites, l'artiste prend soin de préciser sur un tableau que: "cette exposition n'est pas une incitation au suicide mais une réflexion sur la mort dans l'art". Une réflexion et un pied de nez à la mort, un acte conjuratoire. Il y a des peintres beaucoup plus déprimants.


   En plus des treize suicidés célèbres exposés sur les murs de la galerie Templon, Ben a compilé une longue liste dans sa newsletter 2. Même dans l'horreur, il y a de l'humour.

"à mort la liberté", acrylique sur bois et corde
Ben, "Ils se sont tous suicidés"



Voici quelques exemples de suicidés célèbres cités par Ben.

Arthur Cravan, écrivain dadaïste, boxeur, et neveu d'Oscar Wilde, sans doute suicidé par noyade au cours d'une tentative de traversée de l'Atlantique à la rame.
Édouard Levé, écrivain photographe: « Décrire précisément ma vie me prendrait plus de temps que de la vivre ». Il dépose chez son éditeur son dernier manuscrit, Suicide, trois jours avant de se donner la mort, en 2007, à l'âge de 42 ans.

Empédocle, médecin et philosophe grec, banni de sa ville natale, se serait jeté dans l'Etna en fusion, laissant au bord du cratère, une de ses chaussures comme preuve de sa mort.

George Sanders, l'acteur britannique s'est suicidé le 25 avril 1972 en ingérant un cocktail de Nembutal et de vodka pour abréger les souffrances d'une longue maladie: « Je m'en vais parce que je m'ennuie. Je sens que j'ai vécu suffisamment longtemps. Je vous abandonne à vos soucis dans cette charmante fosse d'aisances. »

Georgette Agutte, peintre fauve et sculpteur, se donne la mort le 5 septembre 1922 à Chamonix, après la mort de son mari, Marcel Sembat : « Voilà douze heures qu'il est parti. Je suis en retard ».





Texte de Ben écrit sur le mur de la galerie Templon
pour l'exposition "Ils se sont tous suicidés"

Jean Eustache, le cinéaste se tire une balle en plein cœur en 1981. Sur la porte de sa chambre, il avait punaisé une carte :« Frappez fort. Comme pour réveiller un mort. »

Louis II, Roi de Bavière, protecteur des arts et bâtisseur de châteaux extraordinaires, se suicida après avoir étranglé son médecin dans le lac de Starnberg, près de Munich.

Paul Celan s'est jeté dans la Seine le 20 avril 1970. Il avait dans sa poche deux billets de théâtre non utilisés pour "En attendant Godot".

Rembrandt Bugatti, sculpteur animalier et frère d'Ettore, le créateur automobile, se suicide au gaz en 1916, après l'abattage des animaux du Zoo d'Anvers dont beaucoup avaient été ses modèles. 4

    Fasciné par le suicide, Ben l'exorcise en en faisant le sujet unique de sa dernière exposition. Sur le carton d'invitation au vernissage, il met une petite pique. En effet, il expose dans l'impasse alors que Claude Viallat expose dans la galerie principale, plus prestigieuse.

J'EXPOSE CHEZ DANIEL TEMPLON
Ça me ferait plaisir si vous veniez à 18h33
30 rue Beaubourg
c'est l'heure à laquelle je prends la parole
je suis dans la galerie en face du 30
dans l'impasse
Ca tombe bien la vie est une impasse, un cul de sac
Donc j'expose dans l'impasse
Il y a un restaurant Chinois juste à côté
   Ben Vautier est né en 1935 à Naples, il arrive à Nice en 1949, où il vit et travaille toujours. Il se fait connaître à partir de 1959 grâce à son « magasin fourre-tout, lieu de rencontres et d’exposition ». Un des fondateurs du mouvement Fluxus, il affirme que tout est possible en art et que tout est art.3 Artiste conceptuel et populaire, Ben amuse la galerie. Comme il l'écrit sur le mur: "tout ça reste un grand mystère".

Bonne crise, acrylique. Ben, "Ils se sont tous suicidés"
Ben, "Ils se sont tous suicidés"
10 janvier - 21 février 2009
Galerie Templon    30 rue Beaubourg
75003 Paris
 

 

Liens sur ce blog:

Ben, l'art me fait rire, c'est quoi l'idée? exposition à Paris

Ben, petite phrase: la vérité sonne faux

Art et publicité: Ben (Vautier), je me sens libre ici, affiches publicitaires de Logis

Les maîtres du désordre, Ben: pas d'art sans désordre  


Palagret
art contemporain


1- in
L'Esprit du temps - Janvier 2009

2- Ben vend tout
3- in dossier de presse

4- Newsletter de Ben

 


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11 janvier 2009 7 11 /01 /janvier /2009 19:20
      
   A côté des colonnes de Daniel Buren cachées par une palissade rouge, une sculpture de Pol Bury est en réfection sous une boîte blanche. Il y a longtemps que les sphérades, fontaines cinétiques, de l'artiste belge ne tournaient plus sur leur axe avec le mouvement de l'eau. Il était difficile pour l'Etat de restaurer "les deux plateaux" de Buren, sans se soucier de Pol Bury mort en 2005.              

La fontaine-sculpture de Pol Bury en réfection
sous une boîte blanche
, Palais-Royal

  La deuxième sculpture-fontaine de Pol Bury n'est pas recouverte pour l'instant; elle sera réparée dans un deuxième temps. Les dix sphères d'acier inoxydable reflètent les colonnes et la palissade rouge mais, le jour de la photo, l'eau ne ruisselait pas. Sans doute à cause du froid inhabituel.

La deuxième fontaine-sculpture de Pol Bury
devant la palissade de Daniel Buren

   Les travaux se termineront en mars 2009. On reverra donc bientôt l'énergie hydraulique mouvoir lentement les sphères brillantes au milieu des éclaboussures. L'oeuvre cinétique n'a de sens que dans le mouvement accompagné du léger murmure de l'eau.

La fontaine-sculpture de Pol Bury (1985)
réflection de la colonnade sur les sphères miroirs


    Les colonnes de Daniel Buren et les sphérades de Pol Bury sont des installations complexes qui ne prennent tout leur sens qu'avec le jeu de l'eau et de la lumière. Il était temps de retrouver leur lustre premier.
 
La fontaine-sculpture de Pol Bury en réfection
sous une boîte blanche, Palais-Royal
  
Les colonnades classiques de Victor Louis sont consolidées par des étais, elles menacent de s'effondrer. A quand les travaux?

Cour d'Orléans, Palais-Royal, Paris

Palagret



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11 janvier 2009 7 11 /01 /janvier /2009 00:17

    En s'approchant de la palissade rouge de la cour d'honneur du Palais-Royal, de petits paysages colorés se dessinent  à travers les fenêtres de plastique rouge, bleu, vert, jaune.


"les Couleurs du Chantier"
palissade de Daniel Buren au Palais-Royal



   Cette palissade est une oeuvre éphémère de Daniel Buren: «les Couleurs du Chantier». Depuis les journées du Patrimoine de septembre 2008, les planches entourent le chantier de restauration des colonnes rayées noires et blanches.



Les deux plateaux de Daniel Buren
avant restauration

    « Les deux plateaux », 260 colonnes octogonales  rayées noires et blanches  sont en mauvais état. L'Etat, propriétaire de l'oeuvre, la laissé se délabrer: les matériaux sont dégradés, les fontaines et l'éclairage ne fonctionnent plus depuis longtemps.


"les Couleurs du Chantier"
palissade de Daniel Buren au Palais-Royal

à travers une ouverture


    Depuis le coup de gueule de Daniel Buren en  décembre 2007, l'Etat s'est décidé à restaurer cette commande publique datant de 1986. A l'époque, l'oeuvre in situ du plasticien dans la cour d'honneur du Palais-Royal avait fait couler beaucoup d'encre. Une oeuvre contemporaine dans un lieu historique, quel scandale!


"les Couleurs du Chantier"
palissade de Daniel Buren au Palais -Royal



    Vingt-et-un ans plus tard, la querelle des Anciens et des Modernes est toujours aussi vive: voir les protestations qu'ont suscités Jeff Koons à Versailles ou Jan Fabre au Louvre alors que leurs expositions n'étaient que provisoires!


"les Couleurs du Chantier",
vu à travers la palissade de Daniel Buren au Palais -Royal


    Les colonnes, elles, sont pérennes et doivent être entretenues. La fréquentation intense du site, intégré aux circuits touristiques,  le fragilise. On pensait que la restauration des colonnes de Buren échapperait à la polémique. Mais non, la restauration  va coûter très cher et certains protestent contre l'utilisation de l'argent public pour un artiste vedette.



"les Couleurs du Chantier"
palissade de Daniel Buren au Palais -Royal


    « j’ai dessiné une palissade spécifique pour protéger le chantier et pour permettre également aux « grands » et aux « plus petits » (les enfants), de suivre ce qui allait se passer à l’intérieur. Bien que cette palissade soit a priori une obligation et qu’elle soit donc conforme aux lois en vigueur, elle sera également ici et pour l’occasion, une oeuvre spécifique une sorte de sculpture, dont je suis modestement l’auteur. […] » déclare Daniel Buren1


"les Couleurs du Chantier"
palissade de Daniel Buren au Palais-Royal

croquis préparatoire


   On retrouve sur la palissade percée d'ouvertures carrées les rayures noires et blanches d'une largeur de 8, 7 cm et les couleurs translucides que Daniel Buren affectionne. Les travaux vus à travers le plastique coloré donnent des scénettes irréelles  et on se tord le cou pour apercevoir les colonnes  à moitié cachées par les bâches et les échafaudages.


"les Couleurs du Chantier"
palissade de Daniel Buren au Palais-Royal

croquis préparatoire

   Les travaux dureront un an.
"Les deux Plateaux” comme l’ensemble du site du Palais-Royal sont classés monument historique  Alors que les défenseurs du Patrimoine s'émeuvent dès que l'art contemporain investit le coeur historique de la ville, on les entend beaucoup moins quand la publicité s'approprie l'espace public des murs des monuments classés. La grande bâche commerciale d'Air France sur le Grand Palais est pourtant une tâche autrement plus gênante, imposée au regard des promeneurs!


"les Couleurs du Chantier",
vu à travers la palissade de Daniel Buren au Palais-Royal


Liens:
Photos et analyse de l'oeuvre "les deux plateaux" de Daniel Buren
Daniel Buren: c'était, c'est, ce sera à la galerie Kamel Mennour
Buren, la Coupure au musée Picasso


Les deux plateaux de Daniel Buren
avant restauration


Les Deux plateaux de Daniel Buren
Cour d'honneur du Palais-Royal, Paris


Liens sur ce blog:
Buren, la Pergola colore les pavés de l'Hôtel de la Monnaie
les fenêtres colorées de Daniel Buren à l'Hôtel Salé
La Coupure de Daniel Buren côté cour et côté jardin, Hôtel Salé
Le musée national Picasso
Les colonnes de Daniel Buren en bien mauvais état

La Force de l'Art 2: Daniel Buren, un vitrail éphémère



Janvier 2010: Les colonnes rénovées de Buren à nouveau visibles au Palais Royal



Palagret
janvier 2009
1- in dossier de presse

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9 janvier 2009 5 09 /01 /janvier /2009 19:31

 

    Les sculptures d'Etienne Bossut à l'Hôtel Biron sont tout aussi voyantes que les sculptures de Jeff Koons à Versailles. Les oeuvres contemporaines lisses et colorées créent une dissonance avec les lieux chargés d'histoire. Là s'arrête la comparaison. Alors que Jeff Koons se confronte à l'art baroque du grand siècle, Bossut se confronte à Rodin qui appartient déjà à la modernité. Koons joue avec les icônes de la pop-culture, apportant dérision et sensualité, Bossut décline des formes composées d'objets manufacturés qui en deviennent presque abstraites.



Laocoon d'Etienne Bossut au musée Rodin


    Les trois sculptures d'Etienne Bossut (Laocoon, Grand Laocoon et Laocoon translucide) sont faites d'un encastrement de blocs de couleurs, comme pourrait en construire un enfant obsessionnel jouant avec des Légo géants. Les blocs sont des moulages en résine du fauteuil Orgone dessiné par l'australien Marc Newson. Les sièges multicolores forment un cercle ouvert hérissée de pointes, ressemblant à une carapace de crustacé fabuleux de l'ère plastique.



Laocoon d'Etienne Bossut au musée Rodin


   Le premier Laocoon multicolore est dans le hall de la Chapelle, à l'entrée du musée.



Laocoon translucide d'Etienne Bossut, au musée Rodin

  
Le  Laocoon translucide est exposé au pied de l'escalier de l'hôtel Biron. Deux bronzes de Rodin, un portrait de Jules Desbois (1902) et un de Maurice Haquette, deux barbus oubliés, l'encadrent.

`

Laocoon translucide d'Etienne Bossut, au musée Rodin


   Les circonvolutions de la carapace annelée répondent à celle des marches de  l'escalier.



Laocoon d'Etienne Bossut, au musée Rodin

    Le troisième Laocoon est au premier étage, seul dans une pièce. C'est une spirale plus compliquée que les autres sculptures. Les anneaux colorés ont l'air à l'étroit dans cette pièce.


Laocoon d'Etienne Bossut au musée Rodin


    Les Laocoon d'Etienne Bossut sont un écho à l'exposition "La passion à l’oeuvre, Rodin et Freud collectionneurs" qui présente des pièces de la collection d'antiques des deux hommes. C'est surtout une déclinaison du Laocoon, célèbre marbre antique conservé au musée du Vatican dont on voit une copie dans les jardins de Versailles.1



Laocoon et ses fils
groupe sculpté de Jean-Baptiste Tuby, Philibert Vigier
et Jean Rousselet d'après l'antique, parc de Versailles


    Pline l'Ancien attribuait Laocoon à trois sculpteurs rhodiens, Hagèsandros, Polydôros et Athanadôros. Redécouvert en 1506 dans les ruines du palais de Titus à Rome, le groupe de marbre représente Laocoon défendant ses fils de l'étreinte mortel des serpents, juste avant qu'ils ne succombent. Les personnages livrés à la terreur et au désespoir sont en mouvement, les corps se tordent et cherchent à s'échapper. La théâtralisation baroque magnifie le sacrifice sublime du père et la souffrance des enfants.



Laocoon d'Etienne Bossut au musée Rodin


   A côté des sculptures torturées de Rodin et de la sculpture antique d'une grande intensité émotionnelle, les trois Laocoon d'Etienne Bossut sont bien sages. Il n'y a ici ni effroi, ni sublime, ni fureur, sentiments qui appartiennent à un autre temps et à une autre sensibilité. Il ne reste que l'idée, la forme et le rythme. Les courbes renvoient au combat mortel de Laocoon étouffé par les anneaux du monstrueux reptile. Les sièges en plastique semblent s'avaler les uns les autres comme la gueule du serpent avale sa proie mais il n'y a pas de fin à cette dévoration.  On voit le monstre mais on ne voit pas la proie dans ce Laocoon épuré. Seules les couleurs des sièges apportent une fantaisie très calibrée à la sculpture.


   Le sacrifice de Laocoon est raconté par Virgile dans l'Enéide: pendant la Guerre de Troie les Grecs laissent un cheval de bois sur la grève, avant de lever le siège. Les Troyens, y voyant une offrande à Athéna, veulent faire entrer le cheval dans la ville. Seul Laocoon, un prêtre d'Apollon, s'y oppose en disant:

« Je crains les Grecs, même lorsqu'ils apportent des présents  »1



  Un serpent mord Laocoon, marbre hellénistique


    Deux serpent sortent alors de la mer et se jettent sur les deux fils de Laocoon, Antiphate et Tymbræus, pour les étouffer. Ils s'attaquent ensuite au père  qui tente de sauver ses enfants. Les Troyens comprennent alors qu'Athéna se venge de Laocoon, le blasphémateur qui a osé refuser une offrande qui lui est dédiée. Sans plus tarder, les Troyens traînent le cheval dans la cité, derrière les murailles jusqu'ici imprenables. Laocoon, comme Cassandre, avait raison; le cheval de Troie n'était qu'une ruse des Grecs. On connait la suite de l'histoire!



Laocoon d'Etienne Bossut au musée Rodin


    Après bien des polémiques et un succès public, Jeff Koons et ses bibelots géants ont quitté  les appartements royaux du château de Versailles. Etienne Bossut est au musée Rodin mais il n'y a pas de scandale. Curieusement Koons et Laocoon(s) riment! Bizarre.




Laocoon(s) d'Etienne Bossut au Musée Rodin
77, rue de Varenne  75007 Paris
01 44 18 61 10
Du Mercredi 15 Octobre 2008 au Dimanche 22 Fevrier 2009
Tlj sauf lundi de 9h30 à 16h45.

Liens sur ce blog:
Etienne Bossut dans l'exposition Tokyo-Fontainebleau
Jeff Koons à Versailles
Palagret
art contemporain et patrimoine
janvier 2009

Notes:
1- Ecole de Pergame, école de sculpture hellénistique célèbre au II av. J-C.

2- « Timeo Danaos, et dona ferentes » in  l'Enéide de Virgile, épopée latine – 19 av J.C.
"Voici que, de Ténédos, par les eaux tranquilles et profondes, - je le raconte avec horreur, deux serpents aux énormes anneaux s'allongent pesamment sur la mer et de front s'avancent sur le rivage. Leur poitrine se dresse au milieu des flots et leurs crêtes couleur de sang dominent les vagues. Le reste de leurs corps glissait lentement sur la surface de l'eau et leur énorme croupe traînait ses replis tortueux. Là où ils passent, la mer écume et bruit. Ils touchaient déjà la terre, et, les yeux ardents injectés de sang et de feu, ils léchaient de leur langue vibrante leur gueule sifflante. A les voir le sang se retire de nos veines ; nous nous enfuyons. Mais eux, sachant où aller, se dirigent sur Laocoon ; et d'abord les deux serpents entourent et enlacent les corps de ses deux jeunes enfants en se repaissant de leurs malheureux membres. Puis, comme le père se porte à leur secours les armes à la main, ils le saisissent et le ligotent de leurs énormes noeuds. Ils ont déjà enroulé deux fois leur croupe écailleuse autour de sa ceinture, deux fois autour de son cou, et ils le surmontent de toute leur tête et de leur haute encolure. Lui, il s'efforce avec ses mains d'écarter leurs replis ; ses bandelettes sont arrosées de bave et de noir venin ; et il pousse vers le ciel d'horribles clameurs. Ainsi mugit le taureau blessé quand il s'échappe de l'autel et secoue de sa nuque la hache mal assurée. Mais les deux dragons fuient en glissant vers les hauteurs où sont les temples ; ils gagnent le sanctuaire de la cruelle Athéna et se cachent aux pieds de la déesse sous l'orbe de son bouclier."
Virgile, Énéide, II, v. 199-227


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9 janvier 2009 5 09 /01 /janvier /2009 01:20

    Au centre de la nef du Grand Palais, une plate-forme surélevée permet d'avoir une vue d'ensemble des multiples projections sur les écrans suspendus, sur les murs et sur le sol. Les visiteurs surplombent les vidéos projetées au sol tandis que ceux restés au rez-de-chaussée traversent le faisceau du projecteur et jouent avec leur ombre comme ils le font avec les chiffres de data.tron (Ryoji Ikeda) et les moines de Samuel Beckett (Arena quad). Pedestrian (Kaiser et Eshkar) enregistre en plan séquence de minuscules personnages vus de haut qui traversent la fenêtre de projection noire et blanche



Kaiser et Eshkar, pedestrianDans la nuit des images

     L'orage gronde et les lilliputiens ouvrent leur parapluie poursuivis par des spectateurs géants amusés par la différence d'échelle. Suivent des patineurs qui filent sur la glace, plus difficile à attraper. Les enfants courent après les silhouettes et sautent par-dessus.




    Plus loin, des lettres blanches tourbillonnent sur le ciment sans former de mots. De nouveau, les visiteurs jouent avec les formes qui s'agitent à leurs pieds et sur leurs pieds.

   Dans la caverne lumineuse bruissante d'images et de sons réalistes ou féeriques, les enfants, et les adultes, s'amusent bien.



"Dans la nuit, des images"
Grand Palais, avenue Winston Churchill
du 18 au 31 décembre 2008.
de 17h à 1h du matin - jusqu’à 21h le 31 décembre
Entrée libre

Environ 140 oeuvres - installations et projections photographiques, cinématographiques et vidéographiques - produites par de jeunes artistes et des artistes confirmés et internationalement reconnus dont: Thierry Kuntzel, Bob Wilson, Bill Viola, Nam June Paik, Mickael Snow, William Kentridge, William Klein, Chris Marker, Manuel de Oliveira, Laurent Grasso,Thierry de Mey, Clorinde Durand, Ryoji Ikeda, Zhi Jiang,
Kurt Hentschlager, Kaiser et Eshkar etc ...


Voir: Manifesto de Charles Sandison sur la façade du Grand Palais
       
Data.tron de Ryoji Ikeda et les visiteurs
        Ressac, une oeuvre pirate au Grand Palais

        Arena Quad de Samuel Beckett amuse les visiteurs


Palagret


1- Site Le Fresnoy

 


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7 janvier 2009 3 07 /01 /janvier /2009 15:17

 

    Les murs ne vibrent plus à l'envol des cloches de bronze, immobiles, abandonnées sur le sol de la sacristie. Quoi de plus mélancolique que des cloches au rebut qui ne sonneront plus. Les cloches ont l'air entassées au hasard, comme dans un dépôt, mais elles sont soigneusement arrangées par Claudio Parmiggiani.

 


 

Parmiggiani au Collège des Bernardins
Cloches

 

 

  Claudio Parmiggiani joue avec leurs différentes textures, leur couleur, leur usure. Très simples ou ornées, couvertes de vert de gris avec des traces de rouille, encore attachées à une corde ou à une poutre de bois rongée par les vers, les cloches ne se ressemblent pas. Elles viennent de riches églises ou de pauvres chapelles, unies dans le même silence et la même désaffection.


 


Parmiggiani au Collège des Bernardins
Cloches

 

 

 « (Une cloche) avait été jetée près d'une église avec des meubles, des chaises, comme si le curé avait décidé de se débarrasser de tout ce qui était vieux. Trouver une cloche ainsi, dans la terre, c'était en soi quelque chose d'extraordinaire. Et puis, c'était un objet ancien, assez raffiné, avec son manche en buis et son corps en bronze épais orné de deux médaillons, l'un de sainte Anne et l'autre de saint Antoine de Padoue. Je l'ai gardée toujours près de moi, comme une amulette. Une matière à rêver... » Il hésite: « Peut-on dire cela en français: un réveil à rêves ? »


    « Il y a une (autre) cloche, que j'ai découverte, beaucoup plus tard, à Prague, au début des années 1990. Elle était sculptée dans la pierre, à l'angle d'un bâtiment très ancien, reconverti en une galerie d'art où j'avais été invité à exposer. Elle était emprisonnée dans le mur, incapable de sonner. Et j'ai eu envie, soudain, de visualiser cette voix muette, en convoquant d'autres cloches autour d'elle. C'est ainsi qu'elles sont arrivées dans mon œuvre. » déclare Claudio Parmiggiani en janvier 2009.1


 

 

 

 

Parmiggiani au Collège des Bernardins
Cloches

 

 

   Comme les livres brûlés ou les vitres brisées, les cloches sont le souvenir d'un désastre, une remémoration. Parmiggiani travaille sur la mémoire et le temps avec des oeuvres presque immatérielles.

 
L’immatériel est le matériau essentiel à la vie d’une œuvre. Immatériel signifie pensée et pensée signifie infini. La modernité – comme nous le rappelle Baudelaire – est le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art dont l’autre moitié est l’éternel et l’immuable." 2


 


      

Parmiggiani au Collège des Bernardins
Cloches
    L'empreinte des livres brûlés, le labyrinthe de vitres brisées et les cloches réduites au silence sont trois installations éphémères. Elle n'existent que dans ce lieu et pour ce lieu. Parmiggiani y voit une métaphore de la renaissance. On pourrait aussi y voir l'état de l'Eglise catholique actuelle. Il y a de moins en moins de vocations, les églises ferment et les cloches ne rythment plus depuis bien longtemps la vie des campagnes et des villes.



Parmiggiani au Collège des Bernardins
Cloche et corde


   

   La troisième oeuvre de Claudio Parmiggiani dans l'ancienne sacristie du Collège des Bernardins est seulement éclairée par la lumière du jour. En fin d'après-midi on distingue à peine les cloches posées sur les dalles


 


Parmiggiani au Collège des Bernardins

 




     Le collège des Bernardins, ancien monastère, est l’un des plus grands édifices médiévaux de Paris. Il vient d'être restauré par les Monuments Historiques et l’architecte Jean-Michel Wilmotte.

 

 



Claudio Parmiggiani
Du 22 novembre 2008 au 31 janvier 2009
Une création pour le Collège des Bernardins
du lundi au samedi de 10h à 18h

dimanche de 14h à 18h
entrée libre


Collège des Bernardins
20 rue de Poissy- 75005 Paris

 

 

 

 

Liens sur ce blog:

Claudio Parmiggiani au collège des Bernardins: après le fracas, le silence

Claudio Parmiggiani au collège des Bernardins: le labyrinthe brisé

Evariste Richer: Cumulonimbus Capillatus Incus, au hasard des dés au Collège des Bernardins 

 

 


 

Palagret

art contemporain

janvier 2009

 

 

Source:

1- in La Croix

2- in Journal des Arts, janvier 2009

 


 

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1 janvier 2009 4 01 /01 /janvier /2009 14:34
   Bien involontairement data.tron, l'oeuvre audio-visuelle très conceptuelle de Ryoji Ikeda, se transforme en un théâtre d'ombres. S'interposant entre le faisceau lumineux du projecteur et l'écran, les visiteurs s'amusent avec leur ombre, improvisant des acrobaties qui se détachent sur les lignes et les chiffres qui défilent, se figent et repartent en cascade. 


data.tron (prototype) de Ryoji Ikeda et performance des visiteurs
Dans la nuit des images, Grand Palais


   Quand les chiffres laissent la place à une image plus sombre, les visiteurs attendent patiemment leur retour et alors ils se précipitent pour gesticuler devant l'immense écran. Leurs amis prennent de nombreuses photos et vidéos tandis que les chiffres lumineux défilent sur leur dos ou leur visage.




 
   Pourquoi les visiteurs font-ils des pitreries? Par tradition, comme certains spectateurs font des ombres chinoises au cinéma? Pour conjurer leur malaise devant une oeuvre qu'ils jugent incompréhensible ou ridicule? Pour apprivoiser la musique électronique et la pulsation obsédante des images? Pour se l'approprier? Ou simplement parce qu'ils trouvent data.tron amusant, la répétition étant un des ressorts bien connus de la comédie? Comme avec Arena Quad de Samuel Beckett ou Pedestrian de Kaiser et Eshkar, les gens jouent avec la lumière, attirés par la magie de ces objets virtuels qu'ils modifient avec leur corps bien concrets. Ainsi s'opposent et se rejoignent le virtuel et le réel.


data.tron (prototype) de Ryoji Ikeda et performance des visiteurs
Dans la nuit des images, Grand Palais

   Détourné de sa démarche intellectuelle data.tron (prototype) devient un jeu interactif, une performance spontanée des visiteurs. Data.tron, avec ou sans ses clowns, a une certaine beauté formelle austère avec ses tressautements noirs et blancs traversés de traits bleus. Les nombres, les lignes et l'effet stroboscopique de l'image fascinent et attirent de loin. Plus on s'approche, plus on s'immerge dans ce paysage numérique et plus on a le vertige, enveloppé de nappes sonores, de grésillements et de stridences. La matérialisation du calcul chiffré que nécessite chaque pixel devient une expérience sensorielle.


data.tron (prototype) de Ryoji Ikeda et performance des visiteurs
Dans la nuit des images, Grand Palais

   Les mouvements des visiteurs ne semblent pas agir sur la projection et l'oeuvre est involontairement interactive. Par contre en octobre 2008, lors de la Nuit Blanche à Paris, Ryoji Ikeda a présenté "spectra, matrix", une lumière blanche intense projetée par 64 faisceaux à côté de la Tour Montparnasse. Ce spectacle magique et irréel était accompagnée d'une musique variant avec les déambulations des spectateurs.

 
A Beaubourg, en novembre, Ryoji Ikeda présentait datamatics, un concert installation live, à un public plus sage. Au pupitre son, le japonais modulait les sons et les images qui se nourrissent les uns des autres.


data.tron (prototype) de Ryoji Ikeda et performance des visiteurs
Dans la nuit des images, Grand Palais


    Compositeur de musique électronique et vidéaste à l'ére du virtuel, le japonais Ryoji Ikeda a entamé en 2004 un vaste projet intitulé "Datamatics" qui prend la forme de concerts ou d'installations audiovisuelles. Son ambition est de rendre perceptible le flot abstrait et invisible de données mathématiques qui informent le monde.

« data.tron » [prototype] est une installation audiovisuelle où chaque pixel de l'image est calculé très précisément selon des principes mathématiques, véritable association entre les mathématiques pures et le vaste univers de données présentes dans notre monde.

    Ces images sont projetées sur un grand écran à une vitesse très élevée, jusqu'à quatre fois supérieure à celle d'un film normal, ce qui intensifie la perception du spectateur et accroît la sensation d'immersion dans l'oeuvre.

   Artiste du son depuis 1990, Ryoji Ikeda est aussi bien intervenu dans des concerts performances au Centre Pompidou (1996) que pour la sonorisation du dôme du Millenium à Londres (2000) ou en collaboration avec l'architecte Toyo Ito au Louisiana à Copenhague. Il a été artiste-professeur invité au Fresnoy en 2006/2007.
1



Liens sur ce blog:

"Dans la nuit, des images"
Grand Palais, avenue Winston Churchill
du 18 au 31 décembre 2008.

Environ 140 oeuvres - installations et projections photographiques, cinématographiques et vidéographiques - produites par de jeunes artistes et des artistes confirmés et internationalement reconnus comme Thierry Kuntzel, Bob Wilson, Bill Viola, Nam June Paik, Mickael Snow, William Kentridge, William Klein, Chris Marker, Manuel de Oliveira

Palagret
art contemporain
janvier 2009


1- in dossier de presse "dans la nuit des images"


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29 décembre 2008 1 29 /12 /décembre /2008 16:28

 

 

        Les visiteurs du Grand Palais ne peuvent s'empêcher de voir le côté comique d'Arena Quad, la vidéo de Samuel Beckett projetée en boucle sur le sol en béton. Les enfants, mais aussi les adultes, jouent avec les moines courant à leurs pieds, tentant de les suivre dans leur errance, de prévoir leur mouvement et de sauter par-dessus.


 

Arena-Quad-Beckett.jpgArena quad I + II de Samuel Beckett, projeté au sol

Dans la nuit des images

 


 

 

 

 

 

    Arena quad I + II, l'oeuvre de Samuel Beckett est la « première pièce d'une série expérimentale, Arena met en scène quatre personnages encapuchonnés, sans âge ni sexe, qui entrent successivement dans un espace carré clos par l'un des points cardinaux et se livrent à un rituel répétitif et obsessionnel.

 
   La vidéo est composée de deux séquences dont la structure est la même. La première est en couleur et accompagnée d'une musique de percussions qui entraîne les personnages dans une vive démarche. La seconde séquence, en revanche, est en noir et blanc et silencieuse, ne laissant entendre que la démarche des personnages qui se fait lente et traînante. »
1

 

 


Arena quad I + II de Samuel Beckett, projeté au sol
Dans la nuit des images



    Le sol de béton sur lequel s'inscrit Arena Quad n'est pas uniforme comme un écran de cinéma. Il est plein d'irrégularités et de taches et l'oeuvre en est autant modifiée que par ceux qui la piétinent joyeusement.


Arena-Quad-Beckett-2.jpgArena quad I + II de Samuel Beckett, projeté au sol

Dans la nuit des images

 


 D'autres visiteurs de la Nuit des Images, le nez en l'air, attirés par un visage immense ou par des corps flottants sur un grand écran, marchent à travers les ombres de Samuel Beckett sans même s'en rendre compte. 
    Un peu plus loin, Data.tron, la video de Ryoji Ikeda a un grand succès.

 

 

 

"Dans la nuit, des images"
Grand Palais, avenue Winston Churchill
du 18 au 31 décembre 2008.
de 17h à 1h du matin - jusqu’à 21h le 31 décembre
Entrée libre

Environ 140 oeuvres - installations et projections photographiques, cinématographiques et vidéographiques - produites par de jeunes artistes et des artistes confirmés et internationalement reconnus comme Thierry Kuntzel, Bob Wilson, Bill Viola, Nam June Paik, Mickael Snow, William Kentridge, William Klein, Chris Marker, Manuel de Oliveira

Palagret
décembre 2008
art contemporain

 

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28 décembre 2008 7 28 /12 /décembre /2008 13:49

    Un imposteur s'est infiltré dans l'exposition « dans la nuit des images » au Grand Palais. Sous la nef vibrante d'images, de musiques et de bruits, seulement éclairée par la lueur des écrans plasma et des faisceaux des projecteurs, il est facile de glisser une oeuvre non autorisée. C'est ce qu'a fait Bénédict Ravenol le soir du 25 décembre. Apportant un petit écran plasma, il l'a accroché au mur, non loin de l'éclipse de Laurent Grasso. Piratant l'électricité, l'intrus a diffusé « ressac ».

Ressac
envoyé par Palagret


    Le faible son était couvert par les clameurs des gigantesques vidéos projetées sur les écrans suspendus à la verrière. Les visiteurs sont passé devant « ressac » et l'ont regardé avec le même attention ou la même  désinvolture qu'ils ont accordé aux autres oeuvres. Certains se sont étonnés de ne pas trouver « ressac » sur le plan mais il y a eu des aménagements de dernière minute, ce n'est pas étonnant.

Karma / Cell de Kurt Hentschlager, 2006
Dans la nuit des images

    Il n'y avait pas non plus le nom de l'oeuvre mais c'était le cas pour d'autres projections dont les cadres-photo étaient en panne ou introuvables. Les petits canards  jaunes en plastique
ballotés par les vagues de « Ressac » sont filmés avec un petit appareil numérique; la mauvaise qualité du son et de l'image sont un choix délibéré. « Ressac » fait partie d'un ensemble de vidéos explorant la légende océano-urbaine des canards perdus en mer.



   Bénédict Ravenol s'est installé non loin de la projection de « ressac » pour observer les réactions des visiteurs. Dans l'antre magique de la nuit des images la plupart des visiteurs ont des téléphones portables, des appareils photos ou des caméras. Ils  ont abondamment enregistré les créations numériques. Les canards en plastique ont aussi eu cet honneur bien que les grandes projections attirent plus le regard que les petits cadres le long des murs.

Things would turn simpler, Zhi Jiang, 2006
Dans la nuit des images

    Bénédict est resté plus d'une heure sans que son imposture soit remarquée. Vers minuit, il a alors rangé le fin écran plasma  dans son carton à dessin et il a tranquillement quitté l'exposition nocturne non sans avoir salué le canard de Robert Wilson  (video 50) qui pointait régulièrement son bec jaune en haut du mur. Bénédict a l'intention de revenir le 31 décembre avec « le carré noir », une autre oeuvre vidéo.

La rencontre unique, Manuel de Oliveira, 2008
Dans la nuit des images

  Le ressac ou ressassement est ce qui caractérise l'installation de toutes ces créations numériques sélectionnées par Alain Fleischer du Le Fresnoy-Studio. Les images butent sur les bords du cadre, inlassablement, comme la vague de Thierry Kuntzel. La répétition  lancinante des vidéos montées en boucle, la pénombre trouée par la clarté des écrans,  les musiques obsédantes, tout cela crée une sidération plus propice à l'émotion qu'à l'analyse. Pour s'en arracher les visiteurs jouent avec les images. Ils déambulent d'une oeuvre à l'autre, un peu au hasard, guidés par leur seul caprice.


"Dans la nuit, des images"
Grand Palais, avenue Winston Churchill
du 18 au 31 décembre 2008.
de 17h à 1h du matin - jusqu’à 21h le 31 décembre
Entrée libre

Environ 140 oeuvres - installations et projections photographiques, cinématographiques et vidéographiques - produites par de jeunes artistes et des artistes confirmés et internationalement reconnus dont: Thierry Kuntzel, Bob Wilson, Bill Viola, Nam June Paik, Mickael Snow, William Kentridge, William Klein, Chris Marker, Manuel de Oliveira, Laurent Grasso,Thierry de Mey, Clorinde Durand, Ryoji Ikeda, Zhi Jiang,
Kurt Hentschlager, Kaiser et Eshkar etc ...


Voir: Manifesto sur la façade du Grand Palais
       
Data.tron de Ryoji Ikeda et les visiteurs
        Arena Quad de Samuel Beckett amuse les visiteurs

         Pedestrian de Kaiser et Eshkar

     Bénédict Ravenol et la disparition du Professeur Pierre-Epaminondas Boncam
        Les étranges messages du Salagou collectés par Bénédict Ravenol



Palagret

1- Site Le Fresnoy

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