Deux corps masculins nus, nerveux, presque écorchés, dans une pose dynamique, encadrent la statue très classique de Condorcet qu'ils semblent vouloir atteindre. L'installation provisoire de sculptures de Daniel Hourdé quai Conti attire le regard par l'association de statues de style académique et d'éclatantes lettres rouges.
"ahlala", sculpture de Daniel Hourdé, 1995, quai Conti à Paris
Les lettres rouges qui forment le mot ahlala, soutenues d'une main désinvolte par le personnage de bronze, rendent dérisoire la sculpture. Il ne s'agit plus ici de glorifier un homme illustre, comme Condorcet juste à côté, ou de représenter des vertus civiques ou des allégories comme la République non loin. Le mélange d'art pop et de classicisme, l'utilisation d'une expression triviale, nous font sourire de la pose grandiloquente du modèle et dynamite tout esprit de sérieux.
"ahlala", sculpture de Daniel Hourdé, 1995, quai Conti à Paris
A côté des deux ahlalaphores, "Désillusion totale" est un personnage aux ailes mitées, coiffé d'un bonnet doré qui l'aveugle. S'agirait-il d'Icare qui, voulant s'échapper du labyrinthe, s'est brûlé les ailes en s'approchant trop près du soleil et dont la désillusion est certes totale? Ou s'agit-il de l'artiste?
"Désillusion totale", sculpture de Daniel Hourdé, 2011, quai Conti à Paris
Daniel Hourdé a exposé plusieurs fois en plein air à Paris, sur la place Saint-Sulpice en 2006 et récemment place Saint-Germain des Prés. Transpercé d'éclair rouge (Coup de foudre), se débattant avec des lettres dorées géantes (Abracadabra), brandissant un bocal où git un poisson mort, homme de bronze luttant avec un homme de peluche rouge, corps d'homme au crâne de taureau (Le Minotaure) ou à la tête de mort, vêtu d'oripeaux ou masqué d'or, les sujets du sculpteur combinent une anatomie précise détaillant les muscles du corps humain avec des objets incongrus pour un effet plus comique que dramatique.
"ahlala", sculpture de Daniel Hourdé, 1995
entourant la statue de Condorcet, quai Conti à Paris
Hourdé s'inspire tout autant de la mythologie greco-romaine (Le minotaure, le désarroi de Narcisse) que des icônes contemporaines de la culture pop (Mickey).
"désillusion totale" et "ahlala", sculpture de Daniel Hourdé, 1995,
entourant la statue de Condorcet, quai Conti à Paris
Avant de couler ses statues en bronze, Daniel Hourdé travaille la plasticine, au lieu de l'argile, pour sculpter les corps torturés, dans la tradition classique de la statuaire. Les visages cependant sont seulement ébauchés à coup de spatule, différents du modelé précis des muscles. Ils rendent les personnages anonymes ou archétypaux.
Sculptures en plein air de Daniel Hourdé:
Place Saint-Germain des Prés, juin 2011
Quai Conti, Paris, juillet 2011
Photo de l'exposition de Daniel Hourdé en 2006, place Saint-Sulpice ici
Palagret
juillet 2011
art en plein air