Depuis 1958, Erró collecte des réclames, des journaux, des bandes-dessinées, des images de propagande chinoise, russe ou cubaine, des images photo-mécaniques de toutes sortes qu'il découpe et agence en un fourmillement coloré. De la confrontation d'iconographies populaires ou savantes, d'origine géographique ou temporelle différente naissent des compositions ironiques.
God bless Bagdad, détail, Erró, vers 2001
Illustrations de magazines, épreuves aux encres et papiers de couleurs découpés rehaussés de feutre et collés
Erró sature l'espace du cadre par une multitude d'images agressives ou grotesques qui n'ont rien à voir les unes avec les autres mais dont la rencontre fait naître un sens nouveau, raconte une histoire. Aussi incongru que « la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie » dont parle Isidore Ducasse dans les chants de Maldoror.
King Kong, Erro, vers 1974
Illustrations de magazines et d'ouvrages imprimés, découpées et collées sur une affiche
Dans King Kong (1974), Erró juxtapose le Grand Singe aux portraits de révolutionnaires cubains, dont Fidel Castro, à des avions abattus, un ours blanc, un guerrier africain et une rose rouge.
Tears for two, Erró, 1963
Illustrations d'ouvrages imprimés, découpées et collées sur papier de couleur
Tears for two, 1963, juxtapose un célèbre tableau de Pablo Picasso, "la femme en pleurs", 1937, à une petite voiture rouge elle aussi en pleurs, tirée d'un livre illustré pour enfant
"Don't bother helping us Lantern .., you've already done enough, Space problem, Erró, vers 1992
Epreuve aux encres découpée et collée
Space problem mêle un cosmonaute et un héros de comic-book aux échafaudages d'un tableau de Fernand Léger. Erró utilise souvent des reproductions de tableaux classiques ou modernes (Picasso, Matisse, Léger etc).
Mêlant surréalisme et pop-art, l'agencement des collages d'Erró obéit-il à une sorte d'écriture automatique ou à un choix délibéré longuement mûri? Probablement aux deux.
Science-fiction scape, Erro, 1986-1989
Illustrations de magazines et collages aux encres, découpés
rehaussés de feutre et collés sur bois
L'exposition s'organise en cinq thèmes sur cinq décennies. Les «Mécacollages» mêlent des formes mécaniques à des figures féminines, mannequins stéréotypés de la société de consommation naissante.
Science-fiction scape, détail, Erró, 1986-1989
"Politique" traite de la politique internationale à partir d'images de propagande. «Conquêtes» parle de la violence et de la guerre. "Comics" puise dans la bande-dessinée américaine tout un répertoire de monstres et de super-héros. Dans "Arts", Erro utilise des reproductions de tableau de la même manière que des images publicitaires pour des produits de consommation auxquelles il les juxtapose. A l'âge de la reproductibilité technique, les oeuvres d'art sont désacralisées.
Illustrations de magazines, épreuves aux encres et papiers de couleurs découpés rehaussés de feutre et collés
Les collages ont d'abord été des travaux préparatoires qu'Erro projetait sur la toile pour ses peintures. Peu à peu, les découpages-collages sont devenus autonomes.
Le Musée national d’art moderne a reçu de l’artiste 66 œuvres en donation. Gudmundur Gudmundsson, dit Erró, 76 ans, est un peintre islandais travaillant à Paris. Il appartient au mouvement de la figuration narrative, proche du pop art.
Erró apprécie le street-art. « C'est un art populaire qui m'a toujours intéressé, un art aussi vivant que la bande dessinée ... Il y a une fraîcheur superbe, une gratuité du geste, aussi, puisque le street art naît hors circuit commercial. J'aime bien ce qui n'est pas commercial, l'idée du multiple accessible à tous. Fernand Léger et les artistes communistes vendaient très bon marché en leur temps 1.
Armés de ciseaux et colle, des street-artists utilisent aussi les vieux journaux. A Paris, FKDL colle sur les murs de la ville des silhouettes dont le corps est empli de publicités des années cinquante.
Erró, cinquante ans de collage
15 février - 24 mai 2010
Galerie d'art graphique, Centre Pompidou, Paris
Tous les jours sauf le mardi de 11h à 21h
Liens sur ce blog:
Erró, Femmes Fatales, appropriation et recontextualisation
Erró, l'expo à ciel ouvert au BHV Rivoli en 2008
Jeff Koons, "Fait d'Hiver", plagiat ou appropriation d'une image existante, deux manchots en plus
Palagret
mars 2010
figuration narrative et appropriation
Sources:
Dossier de presse
1- in Le Figaro