Place de la contrescarpe, au-dessus d'une supérette, on peut voir l'enseigne très ancienne d'une chocolaterie: Au Nègre joyeux. Un noir souriant, serviteur ou esclave, est habillé en valet avec des bas blancs et une culotte rayée.
"Au Nègre joyeux", ancienne enseigne à Paris
Le Nègre Joyeux sert une dame bien habillée attablée devant un service à thé. Petit détail insolite, il porte une serviette blanche autour du cou. Serait-il un convive et non un subalterne? Peu probable. Au XVIIIè siècle, les noirs sont représentés au service des blancs et toujours contents!
"Au Planteur", aucune succursale, ancienne enseigne à Paris
Deuxième exemple d'enseigne colonialiste: "Au Planteur". L'image semble peinte sur des carreaux de céramique. Dans un décor tropical, on y voit un homme noir, torse nu et culotte rayée rouge, servant un café à son maître blanc. Là aussi, le serviteur ou esclave est debout et le maître est assis. Le rapport de domination est clair.
"Au Nègre joyeux", ancienne enseigne à Paris
supermarché D19
Aujourd'hui, ces deux enseignes sont choquantes. Elles se réfèrent à un temps où le cirage, le café et le chocolat était associé à la négritude (cf Banania) et où il était banal de considérer les hommes noirs comme inférieurs et donc destinés à nous servir.
Ces images ne sont plus politiquement correctes. Faut-il pour autant les supprimer, comme certains demandent l'interdiction de Tintin au Congo pour cause de racisme? Faut-il appliquer la morale d'aujourd'hui aux oeuvres du passé et marteler les fresques d'Alfred Janniot sur la façade de l'ancien Musée des Colonies?
Ces oeuvres appartiennent à l'histoire de la nation et au patrimoine parisien; elles nous rappellent les erreurs du passé.
Le vieux Paris disparaît si vite qu'il serait dommage de détruire ces deux enseignes. Les témoignages de la France coloniale peuvent cohabiter avec les statues de la Liberté, le Musée de l'Immigration et les sculptures célébrant l'abolition de l'esclavage.
Lien sur ce blog:
Les fers brisés du Général Alexandre Dumas
Trois statues de la Liberté et une flamme, à Paris
Palagret
Le vieux Paris
août 2011